Resident Evil VII : La somme de toutes les peurs
Amie lectrice, ami lecteur, certes, on arrive encore après la bataille : Resident Evil VII est dispo – et cartonne dans les charts - depuis trois bonnes semaines, et nous on débarque, comme ça, alors que tout a été dit sur le dernier Capcom. Pourquoi s'embêter alors, me demanderas-tu (non ? Pas grave, je vais te répondre quand même) ?
Eh ben parce que oui, tout ce que toute la presse spé a déjà dit sur Resident Evil VII est vrai ! À croire que Monsieur Capcom il a fait rien qu'à faire exprès de nous sortir des Biohazards vilains pas bô depuis après le stratosphérique Resident Evil 4, rien que pour mieux décrocher la mâchoire de tout le monde avec cet épisode de la « renaissance » !
Et, assez ironiquement, si Capcom parvient de nouveau à nous coller les miquettes c'est parce qu'il recycle encore, mais cette fois, il recycle les idées...des autres !
Sous influences
Resident Evil VII puise en effet assez largement à la fois chez la concurrence, et pas que vidéoludique. Impossible de ne pas penser à Silent Hill 2 par exemple, au départ du jeu, tant le pitch et la « mise en bouche » sont similaires (Ethan, le personnage principal, reçoit un message de sa femme qu'il croyait morte et part à sa recherche ; arrivé sur place – un coin méga paumé dedans le bayou de Louisiane – une marche angoissante fait bien sentir au joueur à quel point il s'éloigne de toute civilisation rassurante ; et plus tard il empruntera également au chef-d’œuvre de la Team Silent l'utilisation de la lampe-torche faiblarde et du silence comme bande-son principale). Puis on pense pêle-mêle à l'ambiance de True Detective (première saison) pour l'ambiance moite du bayou et de curieux artefacts païens accrochés dans les arbres, Massacre à la Tronçonneuse, une fois atteinte sa destination principale, une très sordide bicoque qui a visiblement bénéficié des talents du même décorateur que celui qui s'est occupé de la demeure de la famille Sawyer, sans oublier La Coline a des Yeux et une bonne touche d'Evil Dead.
Et puis, il y a ce choix capital : basculer en vue à la première personne, Amnesia style ! Un procédé qui non seulement met le joueur dans la peau du protagoniste principal et renforce l'impact de la peur en hors-champ, mais aussi, dans le cas de ce septième épisode, efface totalement le concept de héros iconique, comme pouvaient l'être Léon Kennedy ou Chris Redfield, des badass-guyz bien entrainés au maniement des armes, plaçant du coup la série plus du côté de l'actioner que du jeu d'épouvante.
Fini tout ça. En incarnant Ethan on est au commandes d'un citadin moyen, ordinaire monsieur tout le monde qui – comme l'avait popularisé, encore une fois, Silent Hill – se retrouve confronté à une situation extraordinaire. Et comme le gusse n'a pas de face précise à présenter au joueur, ce dernier peut alors l'investir à plein avec sa personnalité propre. Ça marche toujours et c'est redoutablement efficace !
De tous ces éléments empruntés, Resident Evil VII tire le meilleur et arrive à renouer avec l'art de la peur, la vraie, car il fait simplement oublier...qu'on est dans un Resident Evil ! Il faut en effet avoir l'estomac bien accroché pour passer la première heure du jeu, véritable leçon de flippe d'une violence parfois étonnante de par son côté viscéral. Les choses ne se calment pas par la suite, puisqu'une fois « présentés » aux propriétaires des lieux, la famille Baker – un autre clin-d’œil évident à Massacre à la Tronçonneuse – on a à faire à rien moins qu'une très belle brochette de tarés, dont le sens des valeurs familiales s'exprime de façon plutôt...radicale (ah, ce déjeuner de famille mémorable).
Un bon repas au sein d'une famille aimante... Une certaine idée du bonheur !
Et Resident Evil VII de faire par la suite montre d'un sens du rythme absolument remarquable, là encore une belle leçon de ce qu'il faut faire, et bien faire, pour garder constamment le trouillomètre à zéro...du moins jusqu'à la fin du premier tiers du jeu.
Car si on continuera jusqu'au bout à ressentir cette tension et ce sentiment de danger immédiat et omniprésent, c'est la terreur, pure et dure, qui se sera fait la malle entretemps, la faute à...Resident Evil !
Evil within
Eh oui, si les liens qui rattachent cet épisode au reste de la saga ne sont pas forcément clairs scénaristiquement parlant, la base sur laquelle ce septième opus est construit – toutes inspirations extérieures mises à part – est celle du tout premier Resident Evil (son manoir aux mécanismes improbables, ses passages secrets dissimulés au fond d'une fontaine). Et le problème c'est que ça finit automatiquement par créer un décalage avec l'orientation réaliste des premières heures de jeu. Parce que cet univers poisseux et brut de décoffrage aurait pu nous emmener aux portes de la folie si les développeurs avaient joué à fond la carte de la survie en mode malsain, et pas autre chose.
Hélas, on se retrouve rapidement à devoir résoudre des énigmes capillotractées, genre trouver trois têtes d'animaux à apposer sur un blason pour ouvrir une porte, ou projeter des ombres chinoises pour en ouvrir une autre, des mécaniques d'un autre âge et complétement illogiques compte-tenu du postulat de départ, et qui au bout d'un moment placent inévitablement le joueur en dehors de la suspension consentie de l'incrédulité, nécessaire ici pour se sentir terrorisé. Bref, au bout d'un moment, on y croit moins et on passe en mode progression automatique, avec la désagréable impression de parfaitement distinguer toutes les ficelles du jeu, celles-là même qu'on nous avait soigneusement cachées depuis le début, puisque finalement ce sont celles du tout premier épisode, et que 20 ans après elles ont quand même pris un coup de vieux (sans oublier le retour de quelques dialogues bien Z, comme au bon vieux temps).
Comme un petit air de déjà vu...
Dans le même ordre d'idées, et là aussi à l'instar de tous les épisodes de la série, Ethan se verra rapidement doté d'un arsenal lui permettant de changer sa donne de départ, et même s'il n'est pas un militaire surtestostéroné, passer de la petite lame au fusil à pompe ça dilue hélas le sentiment de panique (fusil à pompe qu'on récupère d'ailleurs à la façon du tout premier Resident).
Mais bon, il ne s'agit aucunement de dire que Resident Evil ne vaut pas le coup d'être joué jusqu'au bout, loin de là ; c'est juste qu'en refusant de refondre totalement sa formule autrement que sur la forme, le jeu y perd inévitablement en peur viscérale et finit par juste devenir une ballade en train fantôme de luxe. Dommage.
En route VR la folie !
Heureusement, pour celles et ceux qui jouent sur PS4 et qui sont équipés du chouette serre-tête de m'sieur Sony, il y a l'expérience en réalité virtuelle, et là...mamma mia !
C'est bien simple, le trip est tellement impressionnant que là, fond qui manque ou pas, on s'en fiche royalement. Un vrai tour de force, mais à VRAIMENT déconseiller aux âmes sensibles (moi-même, il a vraiment fallu que je me fasse violence, et encore, pas jusqu'au bout – ça pas possible sans terminer à la morgue). Le truc, c'est qu'en VR tout est à l'échelle, pour commencer ; donc un fou furieux qui se jette soudain sur vous de derrière une porte que vous venez d'entrouvrir...attaque cardiaque assurée ! Et que dire de l'ambiance globale ? Le rendu de chaque pièce est bluffant, que ce soit pour la finesse des détails, les jeux de lumière, ou la sensation réelle de profondeur – forcément absente sur un écran classique – d'un escalier qui s'enfonce dans l'ombre...
Et n'oublions pas non plus l'excellence des effets sonores, qui, grâce aux capteurs du casque, varient selon votre position et prennent une toute dimension que ceux (déjà très impressionnants) du jeu en « normal ».
Pour reprendre le vieil adage, il faut vraiment le voir pour le croire et là c'est simple : on n'est juste plus face au même jeu,mais alors du tout du tout du tout !
Déjà qu'à la normale t'as pas franchement envie de savoir ce qu'il y a derrière, alors imagine en VR !
Et bien que tous nous ne soyons pas égaux devant la VR, par exemple en ce qui concerne le motion-sickness ou les sensations de vertige, les équipes de Capcom ont assuré comme des bêtes en proposant tout un tas de paramètres pour que chacun puisse s'adapter au mieux. Il est ainsi possible de régler la vitesse de déplacement, la largeur du champ de vision, la rotation de la caméra... Du très très bô boulot qui transforme instantanément Resident Evil VII en must-have si on est équipé...et qu'on est prêt à bien serrer les fesses quand son p'tit cœur lâche.
Chapeau bas !
810Points positifs- Le retour de l'épouvante pure
- La direction artistique "poisseuse"
- Les influences au poil
- Les graphismes superbes
- L'ambiance sonore ultra-flippante
- La vue subjective
- Le rythme impeccable
- La famille Baker
- L'expérience en VR !!!
- Quelques mécaniques datées qui plombent le jeu passé le premier tiers
- Certains dialogues bien Z
- Les couches à acheter en plus si on veut tenter l'expérience en VR !!!
Capcom a finalement décidé de revoir sa formule, qui commençait sérieusement à tourner en rond. Certes, il est un peu dommage que Resident Evil VII soit finalement sans grande prise de risque sur le fond, mais pour ce qui est de la forme, c'est la vraie grande classe, et le jeu réserve son lot de moments bien tendax. Mais le vrai point fort de ce nouvel opus, c'est incontestablement l'expérience en VR, qui redéfinit purement et simplement la notion de peur interactive. Si vous possédez le casque de Sony (et un paquet de couches) il faut absolument essayer Resident Evil VII en totale immersion, c'est juste à mourir (+1 point pour la VR donc, sinon j'aurais mis 7) !
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