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11 mars 2017 - Mandark Divers

Nioh : Ki Bill !

Amie lectrice, ami lecteur, à la base je ne suis pas vraiment client des Souls. Peut-être parce que, tel ce bon vieux sergent Murtaugh, « je suis trop vieux pour ces conneries » et que me farcir 15 game-over dès le commencement d'un jeu me fait par avance suer quand je pense à ce que je vais trouver sur ma route au moment où il y aura « vraiment de la difficulté ». Et peut-être aussi parce que je ne suis pas maso (mais plutôt musô, ouarf !).

Aussi mon enthousiasme quand on m'a dit « il faut que tu testes Nioh, bikôze t'es le seul qui n'a pas de test PS4 sur le feu » était à peu près comparable à celui d'un grand brûlé à qui on demande de préparer un barbecue, par 33°C au beau milieu du mois d'août...

Et pourtant, et pourtant, j'ai bien pris mon pied avec Nioh ! Oh, j'ai bien senti la touche Dark Souls et ce dès les premières minutes, mais très rapidement il fut évident que le hack'n slash de Koei-Tecmo ne boufferait pas qu'à ce râtelier et c'est ce mix adroit entre plusieurs influences – dont certaines chères à mon p'tit cœur de gamer – qui m'ont rapidement plongé dans le trip.

D'ailleurs et à ce sujet, il n'est pas inutile de rappeler ici que Nioh est un jeu qui revient de loin et qui traîna longtemps dans les limbes du « development-hell ».

Ça a quand même de la (sale) gueule !

D'entre les morts

Originellement basé sur « Oni », un projet jamais mené à son terme par feu le sensei Kurosawa Akira, le développement de Nioh par Koei commença en 2004. Son orientation penchait alors du côté du J-RPG pur et dur, pour un travail dont rien ne restera à l'arrivée. Puis en 2008 Koei fusionne avec Tecmo et le projet est repris puis transféré au studio Omega Force, qui choisit alors une orientation musô. Mais carrément pas satisfait, Shibusawa Kou, le producteur du jeu décide là aussi de faire l'impasse. Appelée à la rescousse en 2010 pour s'occuper des combats du jeu, c'est finalement la famous Team Ninja (Dead or Alive, Ninja Gaiden) qui prendra totalement les rênes du projet en 2012 pour en faire le Nioh qui débarque aujourd'hui (tout ça en très gros, bien évidemment).

D'où un soft qui, sous sa forme actuelle, brasse pas mal de références, stigmates de son passé chaotique et qui – c'est la bonne surprise – le fait vraiment très bien !

Certes, dès les premières minutes, j'ai flippé : la tour de Londres n'a rien à envier aux dédales de Dark Souls côté ambiance et le premier garde venu m'a mis une de ces misères... Mais c'était ma faute (ma très grande faute même !). En y allant à la calmos et surtout en apprenant à gérer le « Ki » - cette énergie spirituelle toute asiatique, ici retranscrite par une barre de stamina qui se vide et se remplit selon que l'on attaque, pare ou esquive –, il fut bien plus aisé de torcher l'importun.

Car de la bonne gestion de cette barre, qui si elle tombe à zéro vous empêche proprement et simplement d'envisager la moindre action offensive et/ou défensive – c'est aussi valable pour les ennemis –, dépend la continuité de sa progression. Ainsi faut-il y aller mollo, observer les patterns des adversaires et tenir compte du temps que met la jauge de Ki à se vider puis à se remplir de nouveau selon qu'on est équipé de telle ou telle armure et de telle ou telle arme (l'usage du katana, par exemple, sera moins gourmand en Ki qu'une lourde hache, mais fera bien sûr moins de dégâts). Plus technique, la barre de Ki peut être restaurée immédiatement en cas de contre-attaque réussie mais...

...pour ça comme pour le reste, ce sont vos réflexes qu'il va falloir affuter, car si Nioh doit beaucoup à Dark Souls – on citera en vrac, outre le fait qu'il va falloir se préparer à énormément de game-over, ses patrons très coriaces et vicieux qui demandent une concentration maximale de chaque instant, les « amritas » qui remplissent le même rôle que les âmes chez From Software, ou encore la nécessité d'aller récupérer son XP là où on vient de se faire poutrer – il paye aussi grandement son écot, Team Ninja oblige, à Ninja Gaiden, une autre licence bien connue pour ses combats tendax et millimétrés à la frame près.

C'est là que le choix du contexte historique qui sert de toile de fond à Nioh se révèle particulièrement bien vu : la fin de la période Sengoku, où la guerre civile et les conflits militaires faisaient rage avant l'unification du Japon par le shogunat de Tokugawa (en 1600 après JC pour être plus précis), qui est également une période connue pour être riche en légendes nippones, avec tout ce que ça comprend de tengus, kobolds, yōkais... Bref, d'onis (démons, en japonais).

Un samouraï qui tranche avec ce que vous connaissez !

Good Will slashing !

Débarque alors l'irlandais William Adams (qui, me dit-on dans l'oreillette, aurait été en vrai le premier occidental à fouler le sol de l'archipel et qui dans le jeu évoque furieusement un certain Geralt de Riv) après s'être enfui des geôles londoniennes et avoir effectué un long périple en bateau. Et bien sûr une fois sur place il aura fort à faire pour éparpiller façon puzzle les humains et pas-humains qui ne cesseront de lui chercher des noises. Assez habile donc, cette trame permet à Nioh de mélanger intelligemment réalité historique et surnaturel (un peu à la manière d'Onimusha, une autre référence assumée par les développeurs du soft) et de justifier ainsi la présence d'éléments fantastiques, comme le support d'un esprit animal qui une fois invoqué conférera à Bill un boost de stats, et surtout de monstres bien laids issus du folklore !

Face aux plus vilains d'entre eux, les patrons donc, il faudra s'attendre à décéder souvent, mais au cours d'affrontements tout de même plus nerveux que dans un Souls. Déjà parce que, comme on l'a vu précédemment, Nioh utilise beaucoup de ficelles directement issues de titres exigeants mais nerveux comme Ninja Gaiden et Onimusha et qui font appel à des réflexes pointus, mais aussi parce qu'à ce gameplay vient s'ajouter une autre référence qui compte, Bushido Blade et ses stances.

Pour celles et ceux qui ne connaissent pas, la série Bushido Blade (deux épisodes seulement, hélas ô grand hélas) met en scène des rixes en 1 Vs 1, en mode « un coup t'es mort, et au mieux tu perds l'usage d'un ou deux membres », qui fait grand cas des stances haut-milieu-bas, dont chacune apporte ses avantages et ses inconvénients. On retrouve ce principe à l'identique dans Nioh et il est capital de le maîtriser – en concordance avec chaque type d'arme –, pour ne pas prendre cher et disposer de façon effective des divers malandrins. La garde haute fera plus de bobos mais laissera une plus grande ouverture à l'ennemi et la basse permettra des attaques plus rapides et assurera une meilleure défense ; quant à la garde moyenne, elle offrira un bon compromis entre les deux. Mais dans tous les cas la consommation de Ki (toujours lui !) ne s'en trouvera pas affectée de la même façon.

Une bonne chose cependant, c'est que Nioh se révèle carrément généreux quant au looting. C'est bien simple, il y a toujours tout plein de trucs à récupérer, tout le temps, partout, que ce soit de l'XP, des armes, des pièces d'armures – on pourra aussi les emmener chez le forgeron local pour les améliorer – des potions de soin...

À l'instar des Dark Souls, Nioh peut aussi se jouer en coop, mais c'est au moins aussi alambiqué que chez From Software pour y parvenir. D'abord l'option n'est pas disponible de suite et ensuite il faut avoir récupéré un objet spécifique, appelé coupe Ochoko, sur un type particulier de démon, avant d'aller faire une offrande à l'un des autels qui sert de point de sauvegarde et là il sera possible d'invoquer un allié dans sa partie (détail amusant, dès lors les deux samouraïs se partagent une barre de vie commune en plus de la leur). Notez cependant qu'il faudra une coupe Ochoko à chaque fois que vous voudrez inviter une tierce personne dans votre partie.

Miss Tick

Less is more

Un p'tit mot peut-être sur la direction artistique, amie lectrice, ami lecteur, si tu le veux bien ? Prévu à l'origine pour une autre génération de consoles, on aurait pu croire que Nioh sur PS4 allait techniquement en faire les frais mais, bien que son rendu général évoque assez inévitablement la PS3 (le support prévu à l'origine) le jeu s'en sort avec les honneurs grâce à sa description inspirée du Japon féodal...et sa progression en couloirs découpée en zones distinctes – là où un Dark Souls ou un Bloodborne fournissent des environnements finissant par former un tout unique –, ce qui lui évite d'avoir trop d'éléments à gérer d'un coup. C'est quoi qu'il en soit réussi pour ce qui est de l'ambiance, sans oublier qu'ici les protagonistes parlent chacun leur langue d'origine et la bande-originale, au diapason, déchire !

Bref, bien que fortement inspiré de la formule Dark Souls, Nioh développe suffisamment d'éléments propres pour y gagner une âme (waf !) propre et le challenge qu'il propose comblera sans difficulté les férus de die & retry exigeants – comptez au minimum dans les 40-50 heures de jeu – ainsi que les amateurs de Japon médiéval, tendance fantastique. Donc préparez-vous à mourir très souvent...au Japon cette fois-ci !

PS : il est possible, dans le réglage des options de jeu, de privilégier un rendu qui favorise la fluidité au détriment de la résolution, que ce soit sur PS4 normale ou Pro, afin d'éviter tout problème de ralentissements in-game quand le décor est un petit peu chargé.

死ぬまでの時間 ! 810Points positifs
  • Pas un bête sous-Dark Souls
  • Exigeant mais gratifiant
  • La mécanique de combat, nerveuse et stylée
  • Plein de loot !
  • L'ambiance au top
  • La bande-originale
  • La durée de vie
Points négatifs
  • Parfois vraiment difficile !
  • Parfois un peu vieillot au niveau du rendu
  • La co-op, à la limite de la poignée de main franc-maçonne

C'est dans les vieilles marmites qu'on fait les meilleures soupes ! Nioh réussit l'exploit de combler les attentes et des fans de die & retry à la Souls et de ceux qui y sont réfractaires grâce à une mécanique de combat plus permissive, variée et nerveuse, qui puise son inspiration chez les ténors japonais du genre. Si on ajoute à ça l'ambiance envoûtante de la période sengoku, qui change agréablement des vieux castels sombres, humides, et quand même un poil déprimants, on obtient une petite merveille de hack'n slash, certes ardue et parfois franchement punitive, mais qui vaut largement la ballade pour tout amateur de victoires durement méritées.

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