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29 janv. 2017 - Scribble StarCraft 2

Brood War : la même histoire, racontée différemment

Brood War : la même histoire, racontée différemment

Brood War, avant d’être l’ancêtre de StarCraft II, est l’ancêtre de l’eSport. Ce jeu aux parties aussi compétitives qu'imprévisibles propose surtout des mécaniques singulières qui mettent en exergue le rôle de l'observateur et des commentateurs.

Deux jeux, deux expériences spectateur

Avant d’être un autre jeu, avec des unités et des mécaniques de micro/macro légèrement différentes à celles de StarCraft II, Brood War porte avant tout une autre manière de vivre et d’observer le jeu.

Si les premières minutes de visionnage d’un match de StarCraft : Brood War (SC1) vous arrachent les yeux, sachez que c'est l'archaïsme des graphismes et des mécaniques de jeu qui a fait de Brood War le monstre de compétitivité qu'il est encore aujourd'hui. Rudimentaires, ces mécaniques de micro/macro – particulièrement frustrantes lorsqu’on passe de SC2 à SC1 – sont celles qui confèrent au jeu toute sa profondeur. Moins de raccourcis possibles, moins de groupes de contrôle, interdiction de prédéfinir une série d'actions : voilà qui pourrait sembler plus simple à maîtriser au premier abord. Cela exige en réalité des joueurs de planifier leurs actions de façon encore plus optimale et d'améliorer sans cesse leur multitask
 


Le maître Flash à l'oeuvre.

 

De l’autre côté de l’écran, l'expérience spectateur est tout aussi rudimentaire et singulière. Point de barre de production, d’indicateurs de ressources, de « pings » sur la map pour indiquer un drop ou la pose d’une nouvelle base, et encore moins de barres de points de vie. Une incongruité à l’heure des statistiques balancées à tout bout de champ, quel que soit le jeu pratiqué. Chaque instant, chaque image doit être vue et digérée par le spectateur comme si elle lui était donnée brute. Cette particularité, qui peut être perçue comme un défaut, se transforme subitement en atout pour le spectacle. Car Brood War, en ne livrant qu’une information partielle aux spectateurs – comme si nous étions nous aussi plongés dans le brouillard de guerre – a le mérite d’entretenir soigneusement le suspens tout au long de la partie.

Parce que les images valent toujours mieux que des mots, voici une comparaison entre les deux modes spectateurs : le premier est inondé d'informations quand le second en est totalement dépouillé.

Le mode spectateur sur StarCraft II


 

Le mode spectateur sur Brood War

Sur BW, le spectateur ne dispose que du chrono et de quelques indicateurs visuels.

Make Casters Great Again

Faute d’éléments d’informations fournis en temps réel, la compréhension d'une partie de Brood War repose sur deux éléments fondamentaux : la qualité de l'observation et la précision des commentaires.

Alors que dans StarCraft II, le rôle de l'observateur se réduit essentiellement à montrer les bonnes actions au bon moment – quand celui des commentateurs consiste à faire grimper la tension ; dans BW, ces deux rôles prennent une toute autre envergure. Sur StarCraft – premier du nom – l'omission des informations cruciales, auxquelles le spectateur de SC2 s'était habitué, oblige l'observateur à assurer une réalisation aux petits soins, précise et réactive. Il doit constamment jongler entre les déplacements d'armées et la gestion de la base de chaque joueur, sans quoi le spectateur – comme les commentateurs – n'auraient tout simplement aucune idée de l'avancée de la partie.

Comme si nous ne manquions déjà pas assez d'informations, la minimap est également plongée dans le noir total.

 

C'est là que l'importance des commentateurs se fait le plus sentir. Admettons que l'on ait placé un observateur de renom comme FunKa à la souris, et donc que l'observation de cette partie soit irréprochable à tous points de vue (oui, c'est purement théorique) : il reste encore à décrypter ces images ô combien pixelisées, ces déplacements d'armées parfois maladroits et ces confrontations souvent insipides. Sans éclats d’obus ni réelle visibilité des projectiles, le spectateur peut se retrouver bien démuni devant les interactions du jeu. L’essence même de ce type d'interaction demande ainsi aux commentateurs de faire preuve d’encore plus de précision et de connaissances techniques pour évaluer au mieux les rapports de force qui se jouent sous nos yeux.
 

Ici sur SC2, l'obs a directement accès à un outil de visualisation pour indiquer l'avantage pris par l'un ou l'autre des joueurs.

 

L'absence d'informations a ainsi des conséquences fondamentales sur le comportement et le rôle des casters. Leur approche est intimement liée aux aspects visuels et informatifs de chaque jeu. Aussi, dans SC2, les casters disposent d'innombrables éléments d'analyse de la partie quand BW en est complètement dépourvu. La mission des casters est donc fondamentalement opposée : dans l'un, ils doivent dépasser les simples chiffres et se comporter en véritables « showmen » pour dynamiser la partie et augmenter le suspens – ce qu'ont très bien compris P&T dès leurs débuts ; quand dans le second, les casters se doivent avant tout de sortir le spectateur de son ignorance en adoptant une approche plus didactique, plus analytique et donc plus sérieuse.

 

 

En définitive, Brood War raconte peu ou prou la même histoire mais il la raconte différemment. Loin des statistiques balancées à tout va, qui indiquent précisément et à tout moment au spectateur les écarts de ressources, d’armées et autres informations clefs sur le dénouement de la partie, Brood War joue la carte de l’incertitude, du doute, voire de l’inconnu. Le résultat ? C’est une mise en haleine continue et inébranlable et un retour aux fondamentaux : de la confrontation pure et dure de groupements d’armées. Avec pour conséquence de redonner une place centrale à l’observateur de la partie mais aussi à ses commentateurs, qui quittent leur simple rôle de chauffeur de salle pour recouvrer une nouvelle légitimité d'expert.

Pour ceux d'entre vous qui souhaiteriez vous initier à la scène Brood War, O'Gaming TV vous propose de (re)découvrir ce jeu avec les phases finales de l'Afreeca StarLeague Saison 2. On commence très fort, lundi 30 janvier à 19h avec les demi-finales opposant d'une part le grand Flash au tyran Jaedong, et d'autre part, le Terran Sea au Protoss BeSt.

Dans la foulée, la grande finale pour déterminer qui est le roi du jeu originel, de la graine de l'eSport. Tout cela sur notre chaîne StarCraft II.

 

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